7e mois, an 34 : Uldum

Du sable, du sable, du sable.

Sommes partis de Mulgore le 6e du mois.
Peu de contrats, un climat trop doux, il fallait faire bouger la troupe. La route du sud a été suivie, à travers les Tarides, Âprefange et les Mille-Pointes jusqu'à Gadgetzan. L'air de la ville est encore trop doux, mais au moins ils auront eu un premier contact avec le sable.

Ca glisse et ça déstabilise, ça use et ça force à combattre pour marcher, pour avancer. C'est parfaitement ce qui leur faut. Faire éclater la bulle de confort et de routine de Mulgore, se faire poncer la peau par le sable et le vent, aller prendre l'environnement à bras le corps et lutter pouce par pouce jusqu'à s'y fondre, s'y couler, finalement cesser de combattre et ne faire plus qu'un avec lui.

Ils vont mettre du temps avant d'atteindre ce stade, mais au moins ça les forgera.


On a repris la route le lendemain, sans trop forcer. Dans les ruines trolles, Lisonelle a trouvé sa plante et Salve-Serre une icône trolle. A voir pour refourguer la relique à quelqu'un avant que ça n'attire trop d'emmerdes. En attendant, la troupe se prépare à camper en plein milieu du désert. Sable et ciel semé d'étoiles, lavis monochrome, argent taché du noir des roches contre noir piqué du blanc des astres. Silence. Calme. Et froid. Ça peut foutre les jetons à plus d'un, mais faut admettre que c'est beau. Dommage que le spectacle soit apprécié de si peu.

Faut dire que Salve-Serre a l'air trop occupé avec son bras pour lever le nez, aussi.


Les hostilités commencent. A Gadjetzan il faisait chaud, là on est au coeur de la fournaise. Rien ne bouge, pas un grain de sable, pas un dard de scorpide, rien. Et pas un mercenaire non plus, ils ont vite appris à économiser eau, souffle et forces. La fin de l'entraînement fut rude, on a tous bouffé autant de sueur que de sable, mais s'ils peinent autant c'est qu'ils en avaient besoin.

Le soir, un troll est venu nous voir à propos de l'icône. Je le savais...
Il a parlé d'un temple et d'un trésor, mais l'expédition fut pas concluante. On a choisi de se barrer avec la relique, on démêlera ça plus tard. Pour l'heure, repos, et marche le lendemain. Autant les préparer.


Autant la marche de la veille fut une douce promenade, autant celle-ci promet. Plus de soixante-dix kilomètres à pied, barda au dos et chevilles dans les dunes. On démarre avant l'aube, on trace avant le plus fort de la chaleur, avant que le Soleil lui-même ne nous arrête. Les jeunes tiennent bon pour l'instant, mais le pire c'est la reprise...

Et quelle reprise. Ils sont morts mais ils en veulent encore, ils mordent le sable et crachent leurs tripes sur les derniers kilomètres, je suis fier d'eux. En milieu de soirée du 10e jour, on a fini par s'écrouler et dresser le camp au bord de la Vir'naal. Certains sont déjà partis se noyer dedans.

J'avais oublié les nuits d'Uldum. L'immobilisme millénaire qui flirte avec le bruissement des oasis, le déluge de son et le fourmillement de vie étouffés dès qu'on regarde du coté des ruines sableuses, le calme aussi doux que l'air, qui enveloppe et transporte jusqu'au palais des nuages, là-bas.

Faudra penser à durcir l'entraînement, sinon on va perdre tout le monde en contemplation.