Songes

Mon esprit s'envole. Je me vois cheminer parmi des hautes herbes, je suis sur l’enfant bleu. Les plantes y sont exubérantes et audacieuses, je me balance sur des lianes tropicales et secrètes, je parcours des vallons escarpés et tourmentés, je plonge dans des lacs aériens et voilés, j’escalade des montagnes mythiques et tribales, je m’enfonce dans  des forêts épaisses et symboliques.

Je saute de l’enfant bleu, je me sens tomber... tomber... tomber, je n’arrive pas à m'arrêter, mon cœur s’emballe. Puis j’arrive à toucher un élément cotonneux, je me contemple assise sur un nuage blanc, doux, les pieds pendants dans l’azur, je m’allonge sur le dos, je contemple le ciel intense parcouru d’ornements empourprés.

Je me vois de nouveau chuter de mon assise confortable et douillette, tombant plus légèrement, atterrissant en douceur sur une herbe grasse au bord d’un lac, je me mire  alors dans ces eaux miroitantes et troublées, je m’allonge sentant les signes éphémères du vent,  j’admire les aubes naissantes et les soirs dérivant.

Je me sens de nouveau légère, je flotte sur un océan, je vois des vagues caressant le rivage, je m’avance marchant sur l’eau. Une silhouette apparaît, son regard me transperce, ses yeux s’illuminent, embellissant son visage, un rayonnement de multiples couleurs vient l’envelopper, faisant apparaître toute sa beauté intérieure. Son regard dégage un sentiment de satisfaction, subjuguée je reste  là plongée dans la contemplation.

Mes yeux veulent s’ouvrir,  mon corps sollicite la présence de mon esprit. Alors je note dans un coin de ma mémoire, la magie des lieux et le silence du temps, les couleurs des nuits, la douceur des journées, l’intensité des regards qui s’éloignent, l’éblouissement des sentiments imprévus, les scènes insouciantes de passions inopinées, je m'imprègne de mots inavoués que je n’entendrais jamais, de gestes amples et protecteurs, du caractère surprenant et singulier d’un galant qui n’existe que dans mes songes.

Celui où quand j’ai mal, je range tous mes maux dans une malle, celui où plus un mot je ne dis… je pars alors, je voyage aux pays des rêves, je plonge dans les profondeurs de mon subconscient... là où je pense qu’il fait toujours beau.

Je me sens partir en douceur, un brouillard m’entoure, je souffle pour faire disparaitre cette enveloppe.

Cette silhouette inconnue est encore là, son visage est flou, il me regarde, il a l’air froid, insensible, distant, mais je sens toujours cette douceur en lui, je me sens en confiance,  je suis subjuguée par son regard, envoûtée par le son de sa voix, alors je me laisse aller à l’écouter s’exprimer :

Tu sais, à moi, tu peux parler, te confier, rassure toi, je t'écouterais dans n'importe quels moments. Tant de cicatrices te rappelle ton passé,  je sais que tu ne pourras pas oublier. Tu as besoin d'attention, d'être guidée, alors laisse toi aller.
Tu commences à te relever même si ce n'est pas toujours facile. Tu te sens chétive face à ceux qui t’entourent, mais tu essayes de te montrer forte, et c'est vraiment incroyable de ta part.

Tu y arriveras, tu as des personnes sur qui tu peux compter, fait leur confiance, laisse couler tes larmes si tu dois le faire. Tu as toutes tes blessures dans ta tête qui ne veulent pas sortir. Tu te dis inapte de t’ouvrir aux autres, moi je te dis que tu en es capable.

Tes rêves sont quelque fois noyés par tes larmes, tes regrets,  ton passé. Mais ton futur qu’en fais-tu ? Même si dans ta tête, cela te parait compliqué, le ciel parfois n’est tout noir. Un jour arrivera ou tes rêves deviendrons réalités, quand jour-là arrivera le soleil illuminera ta vie, tu verras un magnifique arc en ciel se poser près de toi. Je serais peut-être là.

Il me connaît si bien, j’ai le sentiment d’être si proche et pourtant si loin de lui … Je sens de nouveau mon corps happer mon esprit. Je voudrais résister, rester auprès de lui. Mais,  doucement, je délite les brumes de mon sommeil. Mes yeux sont encore clos, mais avant  d’ouvrir mes paupières, je m’imprègne  de cette voix grave et chaude, de cette silhouette qui pour moi sera l’étranger de mes songes que j'aimerais rejoindre toutes les nuits.

Je regarde autour de moi, des oiseaux bleus, des arbres de verre m’entourent, je tourne sur moi-même, les bras écarté pour m’imprégner de tant de beauté. Je m’arrête, la tête me tourne,  un semi brouillard m’enveloppe. Je me sens observée. Il est là.

Qui est-il ? Pourquoi se cache-t-il ? Imbriqué dans cette obsession qui m’emprisonne. Nos regards se croisent et se dilatent, s’apprivoisent et s’alourdissent. Je le regarde, le sourire monte en moi, au fond de ma tête et sur mes lèvres. Il me fait du bien, il me fait rire, je le désire.

Ma tête se vide, mon corps s’emporte. Il est une obsession sensuelle, un désir viscéral, qui attaquent mes poumons et mes entrailles. Je ne sais à ce moment précis, si je souhaite me délecter de l’interdit sans être tourmenter par la suite. Pourtant je sens mon esprit me pousser vers lui.

Sans un contact, mon corps tremble, frisonne, je sens ma peau devenir sienne, un oubli instantané de l'interdit, je ne sens que la douce et immorale culpabilité de l’attente du plaisir. Son corps à l’intérieur de ma tête s’anime. Je m’enfonce dans une délicieuse extase, je suis poussée dans le néant, une explosion de sensations m’envahi, me laissant haletante. Je tends alors la main, essayant d’effleurer son visage afin d’en définir les contours, je ne sens rien…. le vide. Mes cris me réveillent en sursaut. Je suis essoufflée, en sueur, troublée par ce rêve qui avait l’air si réel.

Qui est cet inconnu ? N’est-il qu’un rêve refoulé ? N’est-il qu’un fantasme dans la nébulosité de mes songes ? Ai-je seulement envie de savoir qui il est ?

J’ai encore rêvé….